Dans cette partie de l’interview politique pour Blonde, Quitterie de Villepin revient sur l’expérimentation #MAVOIX conduite à l’occasion des élections législatives 2017 dans 43 circonscriptions en France.
Question : Tu as commencé aussi à te lancer dans un pré engagement politique avec l’initiative #MAVOIX en 2015, qui voulait hacker l’Assemblée nationale en imposant des candidates et des candidats citoyens, est-ce que tu peux nous en dire un peu plus sur cette initiative-là ?
Quitterie de Villepin : Oui, je suis contente de parler de #MAVOIX et de partager ce qu’on a vécu dans cette expérience qui était une aventure horizontale. Donc ce n’était pas un parti politique #MAVOIX en fait, #MAVOIX, c’est né d’expériences politiques partisanes, donc c’est mon cas.
J’ai été très longtemps, il y a très longtemps engagé dans un parti politique. Ce que j’y ai vu était à la fois au départ très enthousiasmant, s’engager au service de son pays, élaborer des idées, ce qui a tendance à disparaître parfois dans le champ politique.
Et en fait, je me suis confrontée à un monde que j’ai perçu en tout cas comme extrêmement violent. Le monde où on est censé préparer de futurs responsables politiques à dessiner les règles du jeu communes où dans ces endroits-là, il n’y avait absolument aucune règle.
Donc, la loi du plus fort.
Donc, voilà un milieu vraiment assez différent de ce que j’avais pu vivre ou dans l’associatif ou dans le monde de l’entreprise et un milieu très peu épanouissant, finalement, pour toutes ces personnes, ces jeunes, ces femmes qui voulaient s’engager au service de leur pays en choisissant un endroit, un parti politique et en fait, #MAVOIX, c’était une sorte de miroir inversé d’un parti politique.
Et donc, du coup, c’était… Il n’y avait pas d’adhérents, pas d’adhérentes, pas de structure juridique. Ce n’était pas un parti politique. C’était vraiment un mouvement horizontal, coopératif, décentralisé, dans lequel on se rejoignait donc sur une méthode.
La méthode était effectivement d’appeler des citoyennes et des citoyens à être candidats aux législatives. Ils étaient désignés par tirage au sort, alors que dans les partis politiques, c’est des investitures après de longues négociations dans des conditions là aussi pas terrible.
Et l’idée, c’était d’enlever les verrous de tension, de compétition, où c’est, là, la loi de celui qui parle le mieux, celui qui a le plus de réseau, celui qui a le plus d’argent, pour essayer de faire en sorte… Qu’est-ce que ça veut dire ?
Et #MAVOIX, c’est vraiment une expérimentation, si on change les ingrédients d’un collectif citoyen, qu’est-ce qui se passe ? Qu’est-ce que ça produit sur les personnes qui y contribuent ?
Et donc, il y avait beaucoup cette règle du tirage au sort qui permettait de pas s’étriper et tout ça.
L’autre règle, c’était : pas de personnification médiatique.
Il n’y avait pas de porte-parole à #MAVOIX.
C’était vraiment… Chacun et chacune pouvait s’exprimer sur les réseaux sociaux. Mais il n’y avait personne qui allait incarner et être porte-parole de ce mouvement-là. Et ce qu’on retrouve après dans d’autres mouvements comme les Camille dans les ZAD, par exemple, qu’on retrouve aussi à Nuit debout, où chacun parlait en son je, était interdit de parler au nous.
Les gilets jaunes ont eu évidemment des personnalités qui ont émergé sur les plateaux télé, mais ça a été très difficile pour elles. Est-ce qu’elles étaient là en tant que représentantes d’autres gilets jaunes ? Mais au nom de qui ? Au nom de quoi ? Quel mode de désignation ? Et tout ça.
Et donc, on voit qu’il y a vraiment, pour générer du collectif, on voit que cette question de la personnification médiatique, qui est très prégnante dans le monde traditionnel politique et là, on cherche et on essaie de regarder comment est-ce qu’on peut faire #MAVOIX testait aussi ça.
Et c’était comment on finance une campagne, donc #MAVOIX a présenté 86 candidates et candidats dans 43 circonscriptions françaises aux dernières législatives.