Faire le choix de la délibération en politique ça change quoi ?

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Blonde Media : « Faire le choix de la délibération en politique ça change quoi ? Réponse avec Quitterie de Villepin qui mène une campagne aussi courageuse que revivifiante pour notre démocratie »

Je me sens super bien après six mois de campagne intense, donc je pense qu’on fait la plus longue campagne de France des législatives. La difficulté aurait été d’être fatiguée quand les autres arrivent et commencent. Mais pas du tout, en fait, je pense que dans l’effort, dans le terrain, ça nourrit aussi beaucoup.

Donc on est par exemple trois fois par semaine le matin, devant les écoles, on visite les commerçants et les commerçantes qui nous disent bonjour, merci de venir, vous êtes la seule à venir nous voir !

L’équipe a énormément grandi. On est parti à six en septembre et là, on est 26 bénévoles, on est toutes et tous bénévoles, à accorder beaucoup de temps à cette campagne. Certains, c’est deux jours par semaine, d’autres trois, d’autres quatre. Certains, c’est des soirées. Voilà c’est intégré dans nos vies. Donc on était aussi dans un rythme très intense et à la fois très galvanisant parce que ça résonne fort.

Il y a six mois, quand on s’est vu, on avait posé des intentions pour cette campagne, des ingrédients, des piliers fondateurs de cette campagne. Donc, tu te souviens, c’était d’abord la délibération : de dire le modèle représentatif ne fonctionne plus.

Et donc nous croyons qu’à travers la délibération, en tant que députée, je vais mettre en place des espaces de délibération pour que les habitants et les habitantes viennent participer à la fabrication de la loi.

L’idée, c’est quoi ? L’idée, c’est de légitimer et d’améliorer les décisions politiques. C’est de ne pas être l’émanation, une députée Playmobil qui vote, comme on dit de voter. Mais plutôt de construire ces décisions, ces délibérations à travers des réunions avec les habitants et les habitantes.

L’idée, c’est de nourrir nos regards sur la loi à partir des expériences de chacune, de chacun, des vécus, nous réapproprier les enjeux et pouvoir ensemble, avoir plus d’impact dans la vie politique.

Ça, c’était le premier pilier et le second pilier, c’est de dire : arrêtons d’inventer des programmes et de raser gratis à chaque élection. En fait, on a déjà une feuille de route, ces feuilles de route, c’est l’Accord de Paris sur le climat et les 17 objectifs de développement durable qui traitent de la pauvreté, de la faim, de l’égalité entre les sexes, de l’éducation, de la santé, du bien-être.

Il y’en a 17 comme ça. Et en fait, c’est ça. C’est ça qui va permettre de nous fédérer et de nous rassembler, au-delà des étiquettes partisanes, au-delà de l’épuisement démocratique.

Gagnons du temps. On a signé ces textes.

Soit on les met en œuvre, soit on en sort. Mais moi, je pense qu’il faut les mettre en œuvre et qu’on n’a plus une seconde à perdre.

Pas un seul euro de l’État à investir et qu’en fait, aujourd’hui, il faut absolument qu’on fasse converger tous nos efforts dans l’Assemblée nationale, mais aussi en dehors.

Et donc c’est ça que je propose comme feuille de route politique.

Et la nouveauté ?

Ce qu’on a porté sur le terrain, c’est ça résonne fort chez les gens.

Dans un moment où il y a une très grande perte de repères où les partis politiques d’antan disparaissent sous nos yeux.

Je parle par exemple des Républicains ou du Parti socialiste, ou il y a une sorte d’effondrement des partis politiques. D’une part, l’accueil des personnes est vraiment super positif.

Bonjour, c’est pour quel parti ? Il n’y a pas de parti.

Je suis une candidate indépendante et je veux réparer le lien avec la démocratie.

Et là, tout de suite, les portes s’ouvrent. Je vous écoute. Et donc, ensuite, c’est vraiment assez beau de voir des personnes qui sont…

J’ai 20 ans d’expérience de terrain derrière moi, jamais, j’ai vu des personnes aussi perdues, en fait sur leur vote, notamment pour l’élection présidentielle.

Qu’est-ce qu’il faut voter ? Dites-moi, ça fait 40 ans que je suis un homme de gauche, qu’est-ce qu’il faut que je vote ? Et je suis un monsieur plutôt conservateur, qu’est-ce qu’il faut que je vote ?

Et donc de dire qu’en fait cette élection présidentielle, elle nous entrave, elle nous met en incapacité, elle n’est même plus en capacité de créer un quelconque espoir.

Vraiment, ça, c’est important.

Et du coup, je dis bah voilà, on fait comme on peut avec cette élection présidentielle. Mais, en revanche, ce que je vous propose, c’est que juste derrière, ça y est, on a compris que ça ne marchait plus. On réinvente un chemin nouveau, on trace une route nouvelle en politique.

Donc, quoi que vous votiez à l’élection présidentielle, je pense que ce qui compte pour nous aujourd’hui, peu importe quel est le futur exécutif national, le prochain gouvernement, il n’est plus question d’être pour ou contre. Ce n’est plus le temps de cette question.

La question, c’est d’être pour l’accord de Paris, pour des objectifs de développement durable, pour retrouver de l’impact sur nos vies. Le GIEC a été très clair. Il nous reste trois ans pour inverser la trajectoire des émissions de gaz à effet de serre.

Chaque minute compte et chaque loi va compter. Et donc voilà, je pense que nous n’avons plus le temps de partir dans des oppositions stériles ou dans des jeux politiques stériles, dans ce théâtre de jeux déjà faits.

Il y a ceux qui sont pour, l’exécutif, puis ceux qui sont contre. Et voilà les députés godillots, ça sert à vraiment rien. On n’a pas du tout besoin de ça. On a besoin, là, chaque jour de cette prochaine mandature, de 2022 à 2027, de réhausser nos exigences.

Et ça, ça parle.

Sur le terrain, les personnes nous disent, oui, OK. Donc, indépendant, c’est bien, indépendante, c’est bien. Donc vous ne serez pas l’émanation d’un parti politique, mais vous serez vraiment lié, à nos délibérations ? Oui, je serai liée à nos délibérations.

Et sur la feuille de route, il y a un immense soulagement. En fait, il y a un plan. Quand on dit ça aux personnes, il y a des petites étoiles qui se mettent dans leurs yeux, en disant : mais en fait, oui. On avait presque oublié qu’on avait pris ces engagements ou on en parle mais on a l’impression que c’est loin, mais en fait, il s’agirait juste de les mettre en œuvre.

Alors, on a travaillé pendant six mois sur la modélisation, en plus de la campagne et du travail de terrain, sur la modélisation d’une assemblée locale délibérative qui serait la première à être mise en œuvre à partir du 20 juin 2022.

Donc, on a travaillé avec plusieurs personnes, des habitants, des habitantes, qui s’intéressent à la chose politique ou qui aimeraient être en capacité demain de s’approprier la politique, de retrouver du goût de la politique et pas forcément dans la violence de ce qu’on peut percevoir aujourd’hui dans le champ partisan.

Ça, c’est la première chose.

Les autres personnes qui sont venues, ce sont des personnes qui sont passionnées des questions de démocratie. Je pense à des étudiantes et des étudiants du master ingénierie de la concertation de Loïc Blondiaux. Je pense à Dominique Rousseau qui est venu nous éclairer sur la démocratie continue. Je pense à Armel Le Coz qui a monté un nombre de dispositifs impressionnants en France de conventions citoyennes, qu’elles soient nationales ou en local.

Donc, en gros, on a mêlé des personnes qui sont néophytes de ces questions, mais qui ont envie d’être en posture de puissance politique et à la fois des expertises. Donc on a nourri ça.

On aurait pu arriver avec un schéma tout fait, en disant, voilà comment on va faire l’Assemblée locale et basta. Non, on l’a construite patiemment, au fur et à mesure entre ces six mois. Une fois par mois, il y avait une assemblée locale délibérative en forme de préfiguration.

Et on l’a construite au fur et à mesure, vraiment, en partant de ce qu’on savait, de ce que les personnes savaient, ce qu’elles attendaient de leur rôle pendant la prochaine mandature.

On arrive du coup à un dispositif et on a reçu pas mal de coups de fil des personnes expertes de la concertation qui disent : ah ouais, quand même, vous avez vraiment très bien travaillé.

On a très bien travaillé, d’une part parce qu’on s’est inspiré des meilleurs travaux à ce jour sur la démocratie en France et dans le monde. C’est la première chose. Donc on est les héritières et les héritiers de cette pensée politique qui existe déjà sous des formes diverses et variées, mais qui n’existe pas sous la forme de l’exercice de la loi.

Donc on s’est inspiré de ces meilleurs travaux et ensuite on les a adaptés vraiment au réel de ce qu’on pouvait faire demain dans le champ de l’Assemblée nationale.

En gros, ce à quoi on arrive, je vais essayer de le faire rapidement si on a une minute pour essayer de décrire cette assemblée locale délibérative et la forme qu’elle prend.

Ce premier mandat délibératif relie les habitants et les habitantes de la circonscription, la deuxième circonscription de Paris, donc des cinquième, sixième et septième, ça fait 100 000 personnes sur le territoire. Ça, c’est le grand groupe.

Le grand groupe, ces 100 000 personnes, elles vont choisir quoi ? Évidemment, le grand groupe, il ne se gère pas en physique. Je n’ai pas trouvé de salle à 100 000 personnes où on puisse se réunir. Voilà. Donc ces 100 000 personnes, elles peuvent travailler ensemble sur un aspect plutôt consultatif, en numérique. Qu’est-ce que ces personnes vont choisir ?

Si je suis élue le 19 juin, le 20 juin, la première question à laquelle elles devront répondre c’est : où est-ce que je souhaite que ma députée siège ? Dans laquelle des huit commissions permanentes Quitterie de Villepin doit siéger ?

Et donc ça, on a quelques jours pour faire valoir ce choix auprès des grands chefs des commissions et des partis du groupe majoritaire, mais aussi des grands chefs de l’opposition qui se répartissent les huit commissions.

Et l’idée, c’est qu’ils distribuent les 577 députés dans chacune des huit commissions, en leur demandant plus ou moins leur avis.

Mais en général, les petits nouveaux, les petites nouvelles et les non-inscrites finissent là où il y a de la place et on s’en fiche de ce qu’elles souhaitent. L’idée, c’est quoi ? Et on a mené cette question dans la consultation. Donc, là les personnes du territoire sont déjà en train d’élaborer un premier choix de cette commission permanente.

L’idée, c’est quoi ? C’est de réengager un rapport de force politique par le nombre. En gros, demain, le 20 juin, on lance une consultation définitive sur l’une de ces huit commissions.

2000 personnes sur le territoire vont répondre : je souhaite que ce soit la commission développement durable ou la commission des affaires sociales ou la commission éducation etc. ou la commission des finances ou la commission des affaires étrangères ou la commission des lois. Bref, ce choix leur appartient.

Ce sont ces femmes et ces hommes du territoire qui vont orienter là où je dois travailler et ça me semble nécessaire. Dans les quelques jours, où ils vont faire leur choix. On va avoir un résultat. 2000 personnes, 3000 personnes, 4000 personnes auront décidé là où je dois siéger.

Et donc je vais dire à ces messieurs : bonjour, je m’appelle Quitterie de Villepin et je ne peux pas être attribuée n’importe comment dans ces huit commissions. Il y a des personnes qui se sont exprimées, qui souhaitent que j’aille là et j’aimerais faire valoir ce choix.

La réponse sera oui. Ou la réponse sera non. Mais la réponse sera non, peut-être. Et dans ce cas-là, j’appellerai ces 2000 personnes à prendre rendez-vous. Donc nous prendrons rendez-vous avec ce chef de la commission je ne sais pas quoi pour dire : pardon, mais en fait là, il y a un problème et on va discuter ensemble de savoir pourquoi c’est important ce fait politique nouveau. À ce moment-là, ce sera inédit que les habitants et les habitantes se réengagent et mettent les mains dans le cambouis de ce mandat. Donc ça, c’est la première chose.

La seconde chose que le grand groupe des 100 000 personnes vont choisir, c’est l’ODD, l’objectif de développement durable prioritaire. Aujourd’hui, il y a l’éducation qui sort très fort dans la consultation, en tout cas, il y a les enjeux aussi de santé, d’égalité entre les genres et de lutte contre la pauvreté.

C’est le top quatre actuellement de la consultation sur 1093 réponses. Ça, la commission et l’ODD prioritaire, ça va flécher tout le travail annuel de 100 personnes qui vont être tirées au sort et qui vont être représentatives de l’ensemble des habitants de la circonscription et qui vont travailler avec moi toute la première année de la session parlementaire.

Ces 100 personnes seront renouvelées chaque année pour faire grandir aussi la connaissance des lois, de leur fabrication et donc monter en capacité et en puissance les citoyennes et les citoyens de cette circonscription.

À l’intérieur de ces 100, tous les lundis, il y a douze personnes qui pendant deux mois seront, elles, indemnisées, contractualisées, qui viendront délibérer sur les lois avec moi, qui viendront proposer des amendements.

Et on va se battre ensemble pour essayer de faire rentrer l’Accord de Paris sur le climat, les objectifs de développement durable et tout ce travail des 100 personnes plus les douze personnes tout au long du mandat.

Ça, c’est le premier chemin, le travail continu dans la loi. Et aussi, chaque année, avec ces 100 personnes et ces 12 personnes, nous allons faire une proposition de loi, donc construire une proposition de loi avec des évaluations, des auditions.

Voilà, on va faire ce travail d’écriture de la loi. Sur le premier, c’est sûr qu’on sera en réaction par rapport à ce que le gouvernement va proposer. Et là, on va se bagarrer. Moi, et elles et eux, aussi, pour aller chercher les amendements dont nous avons besoin, que nous aurons construits ensemble. Ça, c’est la première chose.

Il y a un deuxième dispositif, un second parce qu’il n’y en a pas de troisième, un second dispositif qui est très politique, qui est plus dans ce temps long de la construction de la loi, du travail dans la Commission, où on a le temps vraiment de se saisir des lois, de travailler dessus qui est un temps beaucoup plus éruptif.

En gros, sur l’espace consultatif du grand groupe, les 100 000 personnes, on va aussi voir loi 1 de la mandature, les personnes auront trois boutons comme les députés : pour, contre, abstentions et donc là c’est la consultation. On n’a pas le temps de délibérer mais globalement on se comporte comme des députés. On vote en fonction de ce qu’on pense être bien. Donc là, c’est une consultation.

Il y a un quatrième bouton qui dit : je veux une délibération extraordinaire sur cette loi. Je suis très en colère ou je suis passionnée par cette loi. Je veux une délibération extraordinaire. Donc là, pour donner un exemple, ce sont des très grandes lois qui cristallise beaucoup de tension, beaucoup de colère, beaucoup de frustration ou alors beaucoup d’envie. C’est la loi climat, c’est tout ce qui concerne par exemple la taxe carbone, c’est aussi le mariage pour tous. C’est vraiment là où ça coince vraiment.

À partir de 1000 demandes de délibération extraordinaire, on loue un gymnase et on invite les personnes à venir. Et là, ce n’est plus les 100 personnes qui n’ont rien demandé à personne qui font ce travail de long cours. C’est mon équipe et moi qui prenons en charge ce moment très politique.

L’idée, n’étant pas d’arriver à un consensus, parce que ça n’est pas en général gérable sur ce type de loi, mais c’est d’écrire la carte des controverses de ce qui se passe à ce moment-là, à cet endroit, dans la deuxième circonscription de Paris. Qu’est-ce qui se passe ? Qu’est-ce que pensent les gens ?

Et on écrit des cartes de controverse. Et peut-être que les pour découvriront qu’ils ne sont pas pour forcément pour les mêmes raisons, que les contre sont aussi contre, mais pas forcément pour les mêmes raisons. Et c’est essayer d’arrêter, de sortir de la posture, par exemple, ce qu’on peut qualifier de meute, mais vraiment de retrouver un sens fin et d’aller chercher ce dont on a besoin pour vraiment comprendre les grands enjeux de cette loi. Donc faire venir des experts, des analyses contradictoires et de voir si ça nous fait bouger ou pas sur cette loi.

L’idée, c’est quoi ? L’idée, c’est que le lendemain matin, quand je prends la parole dans l’hémicycle et que j’annonce la décision qui sera la mienne à ce moment-là, je fasse état de ce qui s’est passé et ce qui s’est dit dans la circonscription. Et là, ça change tout.

En fait, donc, ce siège sur 577 sièges sera vraiment ce relais. Et de mettre en alerte en disant attention, sur cette loi, il y a des trous dans la raquette. Et de regarder le ministre concerné et lui dire : il y a des trous dans la raquette.

Si ça avait été mis en place, les gilets jaunes n’auraient pas, ça ne se serait pas passé comme ça. Si les 577 députés français sur le territoire organisaient de manière permanente des délibérations, ils seraient au contact de ça. Ils verraient les trous dans la raquette et c’est leur job d’aller dire : attention, il y a un trou dans la raquette et c’est vraiment ce qu’on cherche à faire, c’est de dire, en fait, nos décisions, elles sont vraiment enrichies par le retour, l’expérience de chacune et chacun et le regard sur l’impact de cette loi.

Effectivement, on ne voit pas tout, quand on est au gouvernement, on ne voit pas tout, quand on est à Paris, dans un milieu très fermé, entre des professions très sélectives et tout. Mais là, l’idée c’est vraiment de descendre la loi dans nos réels, de la regarder ensemble, quels que soient nos niveaux d’étude. On a les talents, les compétences, on est riche de nos réels et en fait, c’est mieux de discuter avant qu’après une loi.

Donc, le job de la délibération, c’est de voir les problèmes avant qu’ils arrivent où se situent les craintes ou société, et d’améliorer et d’enrichir les lois.