Public Sénat : Loïc Blondiaux réagit à la campagne de Quitterie de Villepin

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Martin Platiau, 20 ans, bénévole dans l’équipe de campagne de Quitterie de Villepin, était l’invité de l’émission 20 ans en 2022 de Public Sénat animée par Tâm Tran Huy. Suite à sa présentation de la campagne de Quitterie de Villepin, visant à mettre en oeuvre le premier mandat délibératif de France, qui associe les citoyens et les citoyennes dans les décisions qui les concernent au premier chef, les lois, Loïc Blondiaux, professeur de science politique  à l’université Paris I Panthéon-Sorbonne, réagit.

Loïc Blondiaux : « Dans un contexte où la démocratie représentative et l’élection ne suffit plus à légitimer les décisions, il faut maintenant s’appuyer sur les citoyens, revenir vers eux dans l’intervalle entre les élections, pour construire collectivement des décisions qui pourront être acceptées. »

Tâm Tran Huy : Martin Platiau, c’est intéressant parce que, vous, pour le coup, dans ce que vous faites comme bénévole avec Quitterie de Villepin, l’idée, c’est aussi, quand même, de construire un programme avec des citoyens et de ne pas être dans des partis traditionnels. Comment ça se passe exactement ?

Martin Platiau : Oui, complètement. On voit qu’il y a beaucoup de violence au sein même des partis. Tout le monde veut son investiture, son petit titre de chef de section, chef de fédération. Et ça, ça n’intéresse pas du tout les citoyennes et les citoyens.

Donc, nous, effectivement, on essaye de mettre en place le premier mandat délibératif de France. Donc à l’échelle parlementaire, ça ne s’est jamais fait. Et donc on va voir les habitantes, les habitants, les acteurs de la circonscription, dans les cinquième, sixième et septième arrondissements.

Et notamment, on va les voir avec une consultation qu’on a mise en place avec des questions qui reflètent un peu ce qu’on a envie de mettre en place. Mais c’est aussi un outil, un peu de vulgarisation de l’institution de l’Assemblée nationale et on essaye de recueillir les tendances.

On a des questions. Déjà la première question, c’est : connaissez-vous votre député ? La plupart des personnes ne le connaissent même pas de nom. Il y a aussi une autre question on parle de l’Accord de Paris, des objectifs de développement durable qui sont notre feuille de route, qui sont la feuille de route de la campagne.

Et pareil sur ces deux points-là. La très grande majorité des répondantes et répondants, il y en a plus de 1000, la très grande majorité répondent : oui, on veut que la France tienne ses engagements sur ces deux textes.

Tâm Tran Huy : Loïc Blondiaux, qu’est-ce que ça vous inspire, cette façon, par exemple, d’essayer de faire de la politique ? Est-ce que c’est vraiment nouveau ? Qu’est-ce que ça vous inspire ?

Loïc Blondiaux : Oui, c’est assez nouveau et en fait ces initiatives-là, elles viennent combler finalement un vide qui a été créé par la déliquescence des partis politiques. C’est à dire que les partis politiques, autrefois, jouaient tout un ensemble de rôle absolument essentiel au fonctionnement de la démocratie représentative.

C’était eux qui étaient par exemple des lieux d’éducation populaire, de socialisation politique, de politisation. C’est eux qui, d’un certain point de vue, se faisaient les porte-parole des demandes des citoyens, des doléances, etc.

Ils jouaient un rôle absolument essentiel d’articulation entre la société civile, entre les citoyens et les institutions et la sphère du pouvoir.

Tâm Tran Huy : Ça s’est perdu ce lien avec les citoyens ?

Loïc Blondiaux : Complètement. On a l’impression qu’effectivement les partis ont fait leurs propositions de leur côté. Non, mais on voit que ces partis politiques se sont transformés en, d’un certain point de vue, machine à, ce qu’ils ont toujours fait. Effectivement, ça a été aussi leur rôle à sélectionner des candidats. En plus, ils le font de moins en moins bien, parce qu’on a vu à travers par exemple, les deux candidats qui ont fait le score, Valérie Pécresse et Yannick Jadot, très inférieur à ce qui était attendu et étaient issus de primaires partisanes plus ou moins ouvertes. Et on voit bien qu’il y a un déclin accéléré des partis politiques. Et la question qu’il faut se poser, c’est : est-ce que la démocratie représentative peut fonctionner véritablement sans parti politique ?

Et c’est pour ça que la démocratie participative n’est pas une menace pour la démocratie représentative. C’est une forme de dernière chance puisque l’enjeu, c’est la légitimation des décisions. Et dans un contexte où la démocratie représentative et l’élection ne suffit plus à légitimer les décisions, il faut maintenant s’appuyer sur les citoyens, revenir vers eux dans l’intervalle entre les élections, pour construire collectivement des décisions qui pourront être acceptées.

Aujourd’hui, avec le système électoral tel qu’il est, avec les partis aussi malades qu’ils sont, ça n’est plus possible. Et on voit bien qu’on atteint avec cette élection présidentielle une impasse complète puisque la tentation maintenant est de changer complètement de système politique.