Dans cette vidéo, Quitterie de Villepin et Delphine Bagarry discutent démocratie représentative, démocratie délibérative et mandat impératif. Un échange stimulant pour comprendre quelles sont les leviers pour essayer de réparer la démocratie.
Tout au long de cet échange très riche, une question centrale : comment prendre soin de la démocratie et renouer le lien entre les citoyennes et les citoyens et la politique.
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Delphine Bagarry : Mandat impératif, difficile de répondre à ça parce que, quand on arrive, qu’on est député, on est effectivement peut-être élu sur un programme, peut-être un programme présidentiel, un programme du parti, qui est peut-être un programme qu’on n’a fabriqué dans la campagne, donc clairement, Quitterie, ce serait pour, pour son engagement à faire cette assemblée locale et de regarder les lois ou en tout cas, les choses à travers le prisme des objectifs de développement durable.
Ça, ce sont les promesses qu’on peut faire.
Après, l’agenda qui s’impose à nous n’est pas forcément un agenda comme on avait prévu et que même votre parti, votre groupe avait prévu, du coup, difficile de répondre à cette question-là.
Je ne sais pas comment, voilà, il ne peut pas exister de mandat impératif en tout cas quand on est député, il me semble, il y a trop d’aléas, trop d’aléas et trop de choses qui manquent, qui viennent se surajouter, qu’on n’avait pas prévues et qui, en plus, ce n’est pas à notre main, de toute façon, et Quitterie l’a rappelé, 90 pour cent des projets de loi viennent du gouvernement.
On ne maîtrise pas le calendrier du gouvernement.
Après, on a un engagement initial. Et puis, je crois que la notion de confiance qu’on peut avoir entre citoyens et élus, c’est ça aussi, c’est de rester soi et d’aller toujours voter selon ce qu’on a pu porter pendant la campagne.
Quitterie de Villepin : Si je peux ajouter un élément de complément, nous, on essaye vraiment, dans cette initiative-là, de travailler, une question qui n’est pas tout à fait le mandat représentatif d’aujourd’hui, qui n’est pas non plus le mandat impératif, qui une sorte de voie et de ligne de crête qui serait le mandat délibératif où la députée, son engagement, qui peut être aussi écrit, est d’installer, de donner des moyens, à une assemblée locale de délibérer. Et ce serait ça l’organisation du mandat.
Là aussi, j’ai l’impression que le rythme du travail à l’Assemblée, si mes souvenirs sont bons c’est mardi, mercredi, jeudi, où se fait l’essentiel du travail à l’Assemblée, ce qui pourrait laisser le lundi ou le vendredi pour siéger dans une assemblée locale délibérative.
Et ça, ce serait sur la question qui vient juste après et après, je te redonne la parole,
Delphine, c’est que, dans l’idéal, dans l’idéal et dans une future révision constitutionnelle, pourrait être institué ce concept, cette expérience d’assemblée locale délibérative qui pourrait prendre des formes diverses et variées, mais qui, un jour, pourrait être une solution.
On sent bien que notre démocratie représentative, elle est fatiguée, elle est un peu à bout de souffle, elle a besoin d’être régénérée. Et qui de mieux que les citoyens et citoyennes pour venir remettre un peu de vivant dans ça ? Et finalement l’Assemblée nationale, c’est un espace de délibération et peut être qu’il faut y adjoindre d’autres espaces de délibération qui viennent faire le lien et ce serait vraiment intéressant.
C’est Dominique Rousseau qu’on va recevoir dimanche prochain, qui a théorisé la démocratie continue et la démocratie délibérative, qui plaide pour une révision constitutionnelle qui mettrait en œuvre ça.
Et donc, ce ne sont pas des grands mots slogans, comme la sixième République, qui veulent tout et rien dire, il y a tellement de 6èmes républiques possibles, mais qui, de manière beaucoup plus humble, apporterait peut-être une pierre sur initier comme ça un tournant du représentatif au délibératif.
Mais c’est vrai que le mandat impératif imposerait que la personne élue s’efface complètement sur des sujets que personne ne maîtrise.
Et donc, du coup, j’entends la question parce que pour avoir exploré dans l’expérience #MAVOIX où c’était vraiment le concept, c’était : des parlementaires, futurs parlementaires #MAVOIX qui auraient été élus, mais qui étaient d’accord pour relayer telles quelles, les décisions, des citoyennes et les citoyens.
Ce n’est pas le cas dans aujourd’hui ce qu’on porte et on essaie vraiment de trouver cette définition du mandat délibératif.
Delphine Bagarry : Oui, après, moi, je ne suis pas prof de droit constitutionnel, donc, c’est compliqué de dire ça, mais je suis, moi, je me suis pas mal intéressé, j’ai pas mal lu sur les référendums d’initiative citoyenne aussi.
Se dire, tiens, on est un certain nombre, on a envie de porter ce sujet et de le mettre en délibération, est-ce que ça ne peut pas exister ? Et je trouve ça extrêmement intéressant.
Alors évidemment, il y a des choses qui… il faut faire attention, il y a des choses qu’il faut borner, et on a de la chance d’avoir une Constitution suffisamment costaud, costaude, pour nous garantir qu’on ne peut pas tout faire, et on ne peut pas tout changer, parce que ceux qui y ont réfléchi avant nous étaient certainement très avertis, mais il y a certainement une autre manière de faire vivre et redonner de la vitalité à la démocratie et du coup, de pouvoir mieux porter, que chacun puisse se sentir plus investi, on va dire.
Maintenant, c’est compliqué.
Est ce qu’il faut changer la Constitution ou pas ?
Je pense que toi, tu vas y faire à ton niveau, certainement, tu n’as pas besoin d’un changement constitutionnel, mais il va falloir que tu fasses un règlement intérieur.
Je pense qu’au sein d’une collectivité, c’est peut-être plus facile aussi.